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ANGE DU ROCK N°6 : MARVIN GAYE

  • Photo du rédacteur: Patrice Villatte
    Patrice Villatte
  • 9 avr. 2021
  • 4 min de lecture

Marvin Gaye eating a waffle in Ostend © swampfactory@hotmail.com
© swampfactory@hotmail.com

Officiellement Marvin Gaye a été abattu par son père, après une dispute familiale, la veille de son 45e anniversaire, le premier avril 1984 ! Officiellement…


Arnold Charles Ernest Hintjens, notre chanteur belge favori plus connu sous le sobriquet d’Arno m’a raconté une toute autre histoire, à moins bien sûr que je ne l’ai en réalité rêvée…


Après un concert réussi sur une célèbre scène de la région parisienne, dans la cuisine du complexe transformé en club cosy pour accueillir les plus parfaits gentlemen, Arno s’est quelque peu épanché dans un français de flamand déglingué difficile à percuter sans l’aide de vapeurs alcoolisées, et m’a révélé que Marvin n’était pas décédé !


Je savais qu’Arno avait fait la cuisine en 1981 pour l’ange de la soul, mais jamais je n’aurais imaginé une telle remise en cause d’une vérité en théorie bien établie. Selon lui, ce n’est pas le père qui a tué le fils, mais le fils qui a tiré. La famille de Marvin a ensuite tout manigancé pour cacher une décision de justice qui lui a collé vingt ans de cabane pour meurtre soi-disant prémédité… Deux décennies plus tard, sans aucune remise de peine – les juges américains n’ayant c’est bien connu que peu d’empathie pour un afro-américain, même mondialement célèbre – Marvin est enfin sorti, bien décidé à fuir un environnement si peu avenant à son encontre.


C’est à Ostende en Belgique qu’il s’est installé, là même où il s’était jadis réfugié pour fuir ses démons, tel un émigré clandestin, accueilli par Freddy Cousaert, DJ, propriétaire de club et promoteur de musique soul pour le plat pays. Arno alors vedette en devenir faisait des piges dans sa cuisine et avait donc sympathisé avec l’américain.


Convaincu par les révélations et anecdotes du belge et muni de l’adresse de Marvin, rue royale face à la digue, je décide d’aller vérifier.


Un mois plus tard Marvin accepte de me recevoir : rendez-vous est pris ce matin sur la plage au niveau du casino Kursaal. Comme d’habitude le ciel est gris, mais le vent ce matin là, décide de nous épargner. À dix heure tapante, Mister Gaye se présente ! C’est un homme de quatre-vingt un ans, aux cheveux couleur argent dans un jogging tout blanc. Seul touche de fantaisie, une grosse chaîne en or pend à son cou. Il a l’air en forme et ressemble à tous ces types qui font leur footing pour rester vivant.


Incroyable, sur cette promenade, je suis en train de causer avec l’homme qui a composé l’un des meilleurs albums de tous les temps. Rolling Stone Magazine vient de placer What’s Going On sorti en 1971 au sommet de son classement et dans mon palmarès personnel cet opus est à la septième place de mes 672 disques préférés…


Quelle destinée ! Marvin a commencé à chanter à l’église, son paternel étant pasteur adventiste du septième jour. Après un séjour à l’armée dont il est renvoyé pour indiscipline, il commence à enregistrer au début des sixties et signe comme batteur avec la maison de disques Motown. Il compose des classiques (qui ne connaît pas I Heard It Through the Grapevine doit immédiatement s‘exécuter…), et connaît rapidement le succès en tant que chanteur/crooner. Sa beauté, sa voix mélodieuse, ses duos fameux avec Kim Weston, Tammi Terrell, ou Diana Ross en font une immense vedette.


Face au vent qui s’est finalement levé, nous évoquons ses exploits mais je ne veux surtout pas l’emmener sur le terrain de ses addictions, de ses dépressions et de ses difficiles relations avec un père jaloux et violent. Je ne me vois pas l’interroger sur cette journée fatidique d’avril 1984 où pour lui tout a dérapé. Nous préférons causer musique ; What’s Going On bien sûr, mais aussi le fameux Let’s Get It On, ou encore le sous-estimé Here My Dear et son dernier chef d’œuvre Midnight Love.


Les questions ne manquent pas et devant mon attitude passionnée, il me propose d’aller chez lui. Il veut me faire écouter ses dernières créations ! Ça tombe bien, il commence à flotter.


C’est installé dans une petite pièce aménagée en studio, face à la baie vitrée donnant sur la plage que Marvin appuie sur le bouton start de son lecteur. C’est prévu pour être son dix-septième album mais il hésite encore sur le titre à donner. Tout sonne comme son album de 1982 qu’il a imaginé comme une suite. C’est le retour d’un artiste brutalement interrompu dans son élan créatif.


Pour ne pas réveiller les voisins, il a ressorti la vieille boite à rythmes Roland TR-808 avec ce rendu sonore si carré et si typique de cette époque. Marvin joue de tout, tout seul sans aucun assistant ou autre musicien. À première écoute, pas de Sexual Healing, ce qui peut très bien se comprendre au vu des préoccupations d’un jeune octogénaire. Le rendu est très synthétique… Imaginez plutôt un long monologue mystique et quelque peu illuminé sur des couches de synthé façon Kraftwerk mâtiné à du Tangerine Dream… Doit-on y voir l’influence de la mer du Nord ou plus prosaïquement faut-il comprendre que pour Marvin le temps s’est quelque peu figé. Lui et son pote Stevie Wonder s’étaient lancés très tôt dans la recherche de sonorités électroniques au service de mélodies proprement géniales et de grooves délicatement funkys. Mais aujourd’hui ces dernières tentatives semblent légèrement datées et le coté soul s’est bel et bien envolé.


Pourtant question actualité, il y a quelque chose que Marvin Gaye n’a pas loupé. Officiellement ses héritiers ont gagné un procès contre Pharrell Williams pour violation de droits d’auteur ; son tube Blurred Lines semblait sonner un peu trop façon Got To Give It Up, chanson que Marvin avait écrite en s‘inspirant fortement du Disco Lady de Johnny Taylor... Conclusion : Monsieur reste financièrement très à l’abri, son patrimoine étant parfaitement géré, il peut continuer à tripatouiller ses claviers.


Pourtant je reste estomaqué face à cet homme âgé dont la passion pour la musique est restée intacte. Les hurlements hystériquement amoureux de la gente féminine en pâmoison quand seul et défoncé il entonnait Distant Lover doivent salement lui manquer. Il a connu la rédemption, il a payé sa dette et mérite qu’on lui fiche la paix. À son âge, il semble bel et bien pardonné.

Marvin Gaye singing around bullets.

À lire en écoutant : Marvin Gaye What’s Going On

 
 
 

1 Comment


chatterbox.zik
Apr 11, 2021

Yeah ! Marvin is alive !!!!

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